Un père et son fils. Tous les deux à un moment crucuial de leur carrière.
et pour ceux veulent en savoir plus, l'excellent papier de Gersende Rambourg de l'AFP
Cinéma-gastronomie-famille,PREV 28/02/2012 - 06:02
L'impossible transmission d'un grand chef, Michel Bras (PRESENTATION)
Par Gersende RAMBOURG
PARIS (FRA), 28 fév 2012 (AFP) - Le génie de Michel Bras, cuisinier français adulé par ses pairs du monde entier, peut-il se transmettre? Le film "Entre les Bras", projeté dès mercredi dans le Sud-Ouest, analyse la transition avec son fils Sébastien, aujourd'hui chef du restaurant trois étoiles de Laguiole (Aveyron).
C'est en 2009 que Michel a donné les clés de sa cuisine à son fils. Mais deux ans plus tard, sous l'oeil de la caméra de Paul Lacoste qui avait déjà consacré un documentaire à Michel il y a dix ans, la tension est perceptible.
De scène en scène, Sébastien, 40 ans, semble condamné, encore et toujours, à "tirer la carte +j'ai tort+", selon la formule d'une fine gueule qui a vu le film, face à l'exigence terrible de son père, 65 ans, qui aurait toujours fait les choses autrement. Irrespirable. Et pourtant, il y a, à l'évidence, de l'amour et une bonne dose de complicité entre ces deux hommes pudiques.
Le film, dont la sortie nationale est prévue le 14 mars, s'ouvre sur la réalisation d'un gargouillou, plat mythique de Michel Bras qui rassemble dans une assiette plus d'une vingtaine de légumes, fleurs, herbes, crus ou cuits.
Partant d'une assiette blanche, le spectateur assiste, pas à pas, à la composition de ce plat signature, merveille de poésie enviée par de nombreux confrères.
Le père et le fils filent ensuite à l'aube au marché de Rodez pour acheter des légumes. "Séba" remarque le "beau lever de soleil" qui pointe. "Oh pas encore", commente Michel. La première d'une longue série de contradictions.
A l'ouverture de la saison, Michel "briefe" le personnel du restaurant. Eviter de citer l'intégralité des ingrédients d'un plat, "après plus personne ne vous écoute", et ne pas dire la "petite" sauce, ou le "petit" condiment: "La poésie, c'est moi et Sébastien qui la faisons".
Devant un plat à composer, Michel dit à Sébastien: "Je ne sais pas pourquoi tu veux compliquer, je trouve que c'est équilibré". "Moi je trouve qu'il manque quelque chose", répond son fil. Ou encore Michel, observant son fils dresser une assiette: "Je l'aurais fait dans l'autre sens". "Oui mais je suis gaucher, pas droitier", rétorque Sébastien en serrant les mâchoires.
"C'est pas gagné pour Sébastien", commente Michel Troisgros, lui-même héritier d'une dynastie de cuisiniers, lors d'une fête à Laguiole. "Il va se révéler quand Michel s'absentera", prévoit le chef étoilé. Pour Pierre Gagnaire, à ses côtés, Sébastien est "très discret, mais il tient sa place".
Dans une séquence au Japon, où les Bras ont un deuxième restaurant sur l'île d'Hokkaido, Sébastien travaille à la création d'un plat. Alors qu'il se concentre, sous le regard grave de son père, il prévient sur le ton de l'humour: "T'as pas le droit de dire un mot".
Evoquant l'héritage paternel, Sébastien affirmait en 2010 à l'AFP qu'il ne cherche pas à devenir son père.
"Mon père ne m'a pas fait de cadeau", confiait-il. "Il y a eu des moments difficiles. Quand vous vous faites houspiller devant une vingtaine de gars qui rigolent dans votre dos...", se souvenait-il en grimaçant. Mais aujourd'hui, "ce que je sais, je ne le dois qu'à moi-même, mon métier m'appartient".
Le film se referme sur le visage de Sébastien, qui regarde son père.
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