PAROLES DE CÉLÉBRITÉS
Bruno Verjus
Il prône le voyage comme exercice de curiosité, arpente le monde en manager et en gourmand et n’a pas son pareil pour dénicher un bon produit. Il collabore régulièrement en qualité de critique gastronomique et chroniqueur au guide Fooding, aux mensuels Trois Couleurs (MK2),...
Son blog
www.foodintelligence.blogspot.com est reconnu comme le meilleur et le plus influent blog gastronomique français. Il a récemment publié "
Recettes pour ma femme, cuisine d'amour et d'humeurs" aux Editions Alternatives.
Bruno, avez-vous des attaches dans les pays de la Loire ? La Loire ? je suis né à Roanne en bord de Loire. Aucun rapport avec la région viticole des pays de la Loire, certes, mais si la Loire berce le coeur de ses enfants de ses douces lumières, elle leur confère aussi un tempérament sauvage à l'égal de son cours aux tracés débordants.
Alors, lorsque je me suis retrouvé co-propriétaire d'un vignoble à Parnay, Turquant et Montsoreau, dans l'appellation saumur blanc et saumur-champigny pour le cabernet franc, j'ai apprécié la douceur d'y vivre, le climat doux et sauvage de ces terres où prospèrent les vignes et leur cépage, le chenin.
Depuis quelques années nous avons cédé la propriété à un jeune vigneron, il y fait des merveilles. Je retourne avec plaisir dans cette région pour le salon du Livre et du Vin de Saumur où j'ai le bonheur de signer mes ouvrages gourmands.
Chaque fois, la même émotion m'illumine lorsque je franchis la féérie du pont des Cadets de Saumur.
Vous êtes un vrai amoureux de cette belle région !
J'aime le climat, encore sous influence des marées de l'Atlantique. Les ciels changeant à la vitesse d'un vol de martinet. La terre de "tuffe", le tufeau, cette craie micacée où sableuse à grain fin, de couleur lactée, crémeuse et mordorée qui scintille de quelques paillettes de mica blanc. Voilà la terre de prédilection du chenin, le cépage des blancs de Loire. Un généreux qui fructifie autant qu'on lui demande et s'offre aux plus abominables vins de Loire comme aux meilleurs. J'aime les vins de chenin, ils sont fait pour l'âme et la contemplation. Savez-vous qu'au début du XXème siècle, un Coteaux-de-saumur du Château de M. Cristal s'échangeait contre 3 bouteilles de Château Yquem ?
Incroyable ! et en grand gourmand que vous êtes, quels plats vous font craquer... et quels vins bien sûr ?
J'ai eu l'occasion de fréquenter quelques pêcheurs en Loire et de cuisiner les aloses, Un poisson à chair grasse et délicate de la famille du hareng. Sinon les charcuteries, les légumes sont légions et les limons de la Loire autorisent une croissance rapide aux radis, asperges et petits pois de printemps, des petits sucres aux arômes de fraîcheur.
Nous avons été parmi les premiers à travailler notre vigne de façon naturelle, bio comme l'on dit maintenant. J'apprécie les vins des vignerons sages et respectueux de la nature.
Que conseillez vous avec les huîtres ?
Pour les huîtres, j'aime trouver de l'acidité, de la vivacité aux vins. Le Melon de Bourgogne, cépage du muscadet, offre une bonne alternative.
Et avec la charcuterie dont vous êtes très friand ?
Avec la charcuterie l'on peut se laisser tenter par un grand cabernet franc d'un millésime un peu ancien où la framboise se pâme aux notes épicées du poivron rouge ; voilà un bel assaisonnement pour les papilles, une andouillette de pied de porc de M. Gérard Girardeau à Saumur lui fera belle escorte.
Quel accord aimez-vous particulièrement ?
Il est pour moi une sensation merveilleuse, un verre de chenin tutoyant une volaille de ferme, de variété La Flèche Noire si possible, bien rôtie au feu de bois fruitiers. Saucer un bon pain à la croûte bien épaisse dans le fond du lèche-frite pour recueillir le jus de poulet, une ultime gorgée de ce chenin de traverse, le bonheur à porté de bouche !
A Paris dans quels restaurant aimez-vous déguster nos vins ?
Les vins de Loire sont bien représentés à Paris. J'aime découvrir les jeunes vignerons de Loire Aux Deux Amis, rue Oberkampf où au Verre Volé de Cyril Bordarier près du Canal Saint Martin.
Propos recueillis par Frédérique de Granvilliers